La candidate écologiste, accusée par les démocrates de faire le jeu de Donald Trump dans les « swing states », a maintenu sa candidature contre vents et marées. (Article publié dans l’Humanité du 4 novembre 2024.)
Elle s’est même fâchée avec ses fils, qui, cette année, ne la suivent pas et l’ont fait savoir publiquement. Mais à 74 ans, Jill Stein poursuit son chemin et représente le Green Party dans l’immense majorité des États, y compris dans tous les « swing states » (sauf le Nevada) où se jouera l’élection présidentielle.
Et c’est à cause du précédent de 2016 que se déchirent sa famille, une partie du cercle de ses amis ainsi qu’une frange de la gauche américaine. Sur les grands panneaux installés au bord des routes, les démocrates se sont payé des publicités la visant directement : « Jill Stein a aidé Trump une fois. Ne la laissez pas recommencer. »
Accusée d’avoir aidé Trump en 2016
Il y a huit ans, lors de la stupéfiante victoire du milliardaire, les candidats représentant les troisièmes partis avaient cumulé 5 % des voix, le plus important total depuis les années 1990. Surtout, dans les trois États du Midwest qui basculaient du côté de Donald Trump et coûtaient la présidence à l’archi-favorite Hillary Clinton, Jill Stein recueillait plus de voix que le différentiel entre les deux candidats des grands partis.
L’establishment démocrate a tôt fait de rendre la candidature écologiste responsable du désastre électoral, comme il l’avait fait en 2000 avec Ralph Nader, lui aussi porte-drapeau des écologistes, après la victoire à 527 voix en Floride de George W. Bush sur Al Gore. « Rien ne prouve que mes électeurs auraient voté Clinton », rétorque en substance la candidate. Pas faux. Rien ne prouve l’inverse non plus.
Les démocrates menacés ?
Son maintien dans la course a déclenché les foudres de l’équipe de campagne de Kamala Harris. Des segments clés de l’électorat traditionnel démocrate pourraient être attirés par l’offre politique de la candidate écologiste : des électeurs pro-Sanders qui se sentent méprisés par l’establishment démocrate ; des étudiants et des électeurs arabes et/ou musulmans, notamment dans le Michigan, furieux du soutien inconditionnel de l’administration Biden au gouvernement israélien… Donald Trump met de l’huile sur le feu à gauche. « Je l’aime beaucoup. Vous savez pourquoi ? Ce qu’elle prend vient à 100 % de chez eux », déclare-t-il lors d’un meeting, en juin.
Certains démocrates l’accusent même d’être au service des républicains et ressortent l’épisode du dîner organisé par Vladimir Poutine auquel elle a assisté, en 2015, aux côtés de Michael Flynn, qui deviendra le conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump. Cette médecin de formation née dans une famille juive agnostique, joueuse de folk à ses heures, rend sa part de venin et compare les électeurs démocrates à une épouse coincée dans une relation toxique « trouvant constamment des excuses pour son partenaire abusif ».
n peu moins culpabilisante, elle déclare au New York Times : « Oubliez le moindre des deux maux. Battez-vous pour le plus grand bien. » Dans son programme : salaire minimum à 25 dollars de l’heure, abolition des dettes étudiantes et médicales… Et, dans une provocation à l’égard du Parti démocrate, qu’elle a quitté il y a deux décennies pour rejoindre le Green Party, elle assure ne pas « exclure » de rentrer à la Maison-Blanche en janvier prochain.