Les choix des villes accueillant les conventions ne relèvent ni du jeu de hasard ni de celui des fléchettes. Le parti républicain a opté pour Tampa, la semaine dernière, pour tenter de faire bouger les lignes en Floride, Etat « faiseur de rois » depuis une décennie, où la « bascule » risque de se faire dans le corridor Orlando-Tampa, le plus dynamique démographiquement ces dernières années. Même objectif pour le parti démocrate avec sa convention qui s’ouvre ce soir à Charlotte, la plus grande ville de Caroline du Nord, dixième Etat le plus peuplé du pays avec ses quinze grands électeurs (soit presque autant que le Michigan) qui peut s’avérer décisif le 6 novembre. En 2008, Barack Obama avait été le premier démocrate depuis Jimmy Carter, en 1976, à empocher la Caroline du Nord, avec 0,32% d’avance sur John McCain. Les sondages accordent actuellement deux points d’avance à Mitt Romney. Certains analystes démocrates avancent que si la convention de cette semaine ne créé pas un frémissement en faveur du président sortant, il faudra délaisser cet Etat pour concentrer ses forces dans d’autres Etats. D’autres insistent sur le fait que le coup est jouable. Ils s’appuient pour cela sur la démographie. La Caroline du Nord est passée de 8 millions d’habitants en 2000 à 9,5 millions en 2010. Ce dynamisme repose notamment sur les « minorités » puisque 61% des nouveaux habitants de la décennie passée en sont issus. Déjà importante dans cet Etat du Sud, la population africaine-américaine ne cesse d’augmenter pour représenter aujourd’hui 22% de la population totale. De nombreux noirs quittent les grandes métropoles du Nord et du Midwest, devenues trop chères à habiter, pour s’installer dans des villes moyennes mais dynamiques économiquement. Avec la Virginie et la Georgie, la Caroline du Nord fait partie du peloton de tête des Etats bénéficiaires. Parallèlement, la part des Latinos augmente : 8,6% aujourd’hui. Ces deux électorats sont favorables au camp démocrate.
Selon une enquête réalisée par un institut proche des démocrates, Romney obtient 54% contre 41% parmi les électeurs qui résident dans l’Etat depuis plus de trente ans. Mais Obama prend l’avantage (58-37) chez les autres avec une pointe à 66-27 pour ceux qui sont arrivés depuis l’an 2000. L’enjeu pour le camp démocrate sera donc de mobiliser, de combattre l’abstention. De ce point de vue, la Caroline du Nord apparaît comme un « banc d’essai » d’une stratégie nationale.
Mais en choisissant Charlotte, le président sortant s’est fâché avec une partie des syndicats, soutiens traditionnels du parti démocrate. « Je suis déçu par le fait que non seulement les démocrates aient choisi la Caroline (l’un des Etats où le taux de syndicalisation est le plus faible dans le pays, NDLR) mais qu’en plus ils ne nous ait pas parlé. C’est la première fois que cela arrive depuis des années”, a regretté Ed Hill said Hill, président de l’International Brotherhood of Electrical Workers union (675 000 membres) qui n’assistera pas à la convention démocrate. Une contradiction de plus à affronter pour le président sortant.