Donald Trump, le dernier allié de Benyamin Netanyahou

Le premier ministre israélien ne peut désormais plus compter que sur le président américain pour mener à bien sa guerre totale à Gaza. Mais l’hôte de la Maison Blanche doit gérer des contradictions inhérentes à ce statut. (Article publié dans l’Humanité du 22 mai 2025.)

Les derniers, mais les plus puissants. Avec le changement de pied de l’Union européenne, les États-Unis apparaissent comme l’ultime allié de la coalition d’extrême droite au pouvoir à Tel-Aviv. Problème : il est aussi celui qui dispose des leviers les plus importants pour obliger Benyamin Netanyahou à mettre fin à sa guerre totale à Gaza.

Malgré quelques frictions entre les deux diplomaties, rien n’indique que l’administration Trump envisage une révision de son soutien inconditionnel. C’est ce qu’a rappelé l’ambassadeur des États-Unis en Israël, Mike Huckabee, lors de récentes déclarations publiques : il n’y a pas de désaccords entre la Maison-Blanche et le premier ministre israélien.

L’annulation de la visite du vice-président J. D. Vance et la tournée de Donald Trump au Moyen-Orient qui ne passait pas par Israël avaient alimenté la chronique de possibles dissensions. Avant le décollage, mi-mai, du président nationaliste pour Riyad, Yanir Cozin, correspondant de la radio de l’armée israélienne, annonçait dans un message sur son compte X que celui-ci avait pris la décision de couper les liens avec Benyamin Netanyahou, suspectant ce dernier de le manipuler. « Il n’y a rien que Trump déteste plus que d’être dépeint comme un imbécile ou quelqu’un qui se fait manipuler. C’est pourquoi il a décidé de couper les ponts avec M. Netanyahou », estimait alors un fonctionnaire israélien.

Vers un revirement de l’administration Trump ?

Il ne s’agissait finalement que d’un simple nuage dans un ciel uniformément serein. Dans un entretien accordé au journal de gauche Haaretz, Mike Huckabee reprend tous les éléments de langage de Benyamin Netanyahou. Il accuse l’Unrwa d’avoir collaboré avec le terrorisme et estime que le Hamas demeure le principal responsable de la situation de famine à Gaza en refusant de libérer les derniers otages détenus.

Surtout, il propose un changement de cap de la diplomatie américaine sur la question d’un État palestinien. « C’est une grande question que les Palestiniens et les Israéliens doivent résoudre », répond-il, renvoyant donc aussi à Israël un sujet qui, au regard du droit international, ne doit relever que de l’autodétermination des peuples, donc des Palestiniens seuls. « Je me demande s’il est vraiment nécessaire de créer un État distinct », ajoute-t-il ensuite. Or, la solution à deux États est la position officielle de Washington depuis les accords d’Oslo.

L’administration Trump s’apprête-t-elle à la remettre en cause ? Si tel devait être le cas, les républicains n’auraient à subir aucune conséquence électorale lors du scrutin de mi-mandat en novembre 2026, contrairement à Kamala Harris, qui a, en partie, payé la calamiteuse politique de Joe Biden en la matière. Le bloc évangélique (dont fait partie l’ambassadeur Huckabee, pasteur de son état), matrice de la base Maga (Make America Great Again), constitue également le pilier du lobby pro-Israël.

Selon un sondage réalisé par le Pew Research Center, la moitié des électeurs républicains estiment que la politique de Donald Trump est équilibrée, contre 13 % seulement la jugeant trop favorable à Israël. Un quart d’entre eux soutient l’idée démentielle d’une prise de possession américaine de Gaza. Les plus fervents partisans de ce projet sont à trouver parmi ces chrétiens évangéliques blancs dont le vote pour le Parti républicain (80 %) s’est renforcé au fur et à mesure de leur recul numérique dans le pays (désormais 20 % de la population).

Mais Donald Trump doit néanmoins affronter une contradiction : son soutien sans faille à une guerre génocidaire renforce l’isolement d’une puissance dont il prétend restaurer la prédominance, voire l’hégémonie. C’est sans doute pour tenir compte de l’émotion grandissante dans le monde que les États-Unis ont d’ailleurs contraint Israël à laisser entrer dans Gaza, en début de cette semaine, le premier convoi humanitaire depuis le 2 mars.

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Classé dans Actualités, Eclairages

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